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Calais : l’impasse européenne

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Depuis le printemps 2014, la situation des populations dites « migrantes » à Calais se détériore toujours un peu plus et dans une certaine indifférence générale.

Le 21 octobre dernier, Sara une jeune éthiopienne est morte en tentant de traverser une autoroute, après avoir traversé une moitié de l’Afrique et de l’Europe pour atteindre enfin son rêve : l’Angleterre. Son périple vers une vie meilleure s’est arrêté brusquement à Calais, à quelques kilomètres de l’île tant désirée, tout à côté, mais tellement loin encore pour ces hommes et ces femmes exilés.

Pris au piège
Sara faisait partie de ces 2 500 personnes venues d'Érythrée, d’Ethiopie, du Soudan, d’Afghanistan, de Syrie et d’ailleurs qui sont aujourd’hui prises au piège devant cet obstacle nommé la Manche. Acculés à Calais, les migrants survivent chaque jour dans des conditions de plus en plus inhumaines et indignes, sans eau, ni électricité, ni toilettes, ni toit, ni chauffage, amassés sous des tentes, sous des hangars ou sous des ponts.
Cette situation dure depuis près de 15 ans. Après la fermeture du camp de Sangatte en 2002, le nombre de personnes exilées présentes dans le Calaisis a quasiment toujours oscillé entre 250 et 700 personnes environ. Néanmoins, les pouvoirs publics locaux ne se sont jamais enquis réellement du sort de ces êtres humains, en préférant les rendre tributaires des trafiquants d’êtres humains et en les stigmatisant* toujours un peu plus, sans jamais tenter de proposer d’alternatives dignes et crédibles. En témoignent les destructions de campements, de squats…

L’attentisme de l’Europe
Depuis la chute du régime de Kadhafi , l’Europe connaît un flux d’immigration clandestine d’une ampleur significative et cela se vérifie à Calais. La Lybie était historiquement l’espace tampon pour contrôler l’immigration clandestine entre l’Afrique et l’Europe. Les drames réguliers des naufrages sur les côtes grecques et italiennes sont des preuves tangibles de cette réalité.
Mais l’Union Européenne, silencieuse et attentiste, semble actuellement n’être capable que d’établir un décompte macabre face à une situation qu’elle laisse, selon le principe de subsidiarité, gérer aux Etats concernés. La charte des droits fondamentaux de celle-ci affirme pourtant : « Consciente de son patrimoine spirituel et moral, l’Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité (…) elle place la personne au cœur de son action en instituant la citoyenneté de l’Union et en créant un espace de liberté, de sécurité et de justice ». Or, dans les faits, la France, comme l’Italie ou la Grèce, sont laissées seules face à cette responsabilité.

Aide aux plus vulnérables
Puisque c’est aux États concernés de se débrouiller, la préfecture du Pas-de-Calais a récemment permis la création d’un lieu d’accueil pour des « publics » très vulnérables. C’est-à-dire l’organisation d’un lieu de mise à l’abri pour des femmes et des enfants.
L’association Solid’R est, depuis mai 2014, en charge de ce dispositif humanitaire et social. Cet espace de vie, ouvert 24h/24h et 7 jours sur 7, accueille une cinquantaine de femmes et une dizaine d’enfants. La volonté associative de l’association Solid’R, inspirée de ses valeurs protestantes humanistes, est d’accueillir chacun(e) comme son prochain. Ce lieu permet à toutes les dames qui le souhaitent de pouvoir se nourrir, se laver, se vêtir, se reposer et pour cinquante d’entre elles être hébergées.
Si aujourd’hui la capacité d’accueil est insuffisante, l’existence de ce lieu est indispensable pour maintenir un minimum de dignité à ces femmes en exils. Mais il ne saurait, loin de là, pallier l’absence criante de solidarité européenne !

*24/10/13 Appel à la délation des squats abritant des migrants par le maire de Calais

 

David Lacour
Directeur de l’association Solid’R

Source : Regards, Proteste n°140, décembre 2014